40 ans d’investissement immobilier : les pays les plus performants
Publiée: 21 juillet 2025Dernière mise à jour : 22 juillet 2025

En 1985, «Retour vers le futur» conquiert les salles de cinéma, Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev se rencontrent à Genève pour leur premier sommet – et dans un petit bureau à Zurich, la société Wüest Partner est fondée. Aujourd’hui, quatre décennies plus tard, environ 500 expertes et experts accompagnent le secteur immobilier grâce à l’intelligence des données, au conseil et à des solutions logicielles. Une chose est restée constante : Wüest Partner n’investit pas elle-même dans l’immobilier – ce qui lui permet de réaliser ses analyses en toute indépendance et sans conflit d’intérêts.
À l’occasion de notre 40e anniversaire, nous nous sommes posé la question suivante : que serait devenu votre patrimoine si vous aviez investi, le 1er janvier 1985, 100 000 unités dans des sociétés immobilières cotées en bourse – et conservé ces positions jusqu’au 31 décembre 2024 – et ce, dans 14 pays différents ?
Méthodologie en un coup d’œil
Hypothèse d’analyse | Explication |
Période d’observation | Du 1er janvier 1985 au 31 décembre 2024 (40 ans). |
Montant de départ | 100 000 unités de monnaie locale (pour les pays de la zone euro, le montant équivalent en euros) ; date d’investissement : premier jour de cotation en 1985. |
Pays pris en compte | Allemagne, Australie, Canada, États-Unis, France, Hong Kong, Italie, Japon, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Singapour, Suède, Suisse. |
Indice analysé | Indices de rendement total pour les actions immobilières (REITs, Property Companies, SIICs, etc.); dividendes réinvestis en permanence. |
Règle du portefeuille | Buy-and-hold (pas de réallocation, pas de couverture) |
Devises | Performance en monnaie locale. |
Coûts | Pas de prise en compte des coûts de couverture, de transaction ou d’impôt – le potentiel brut et le risque de marché pur sont présentés. |
Source des données | GPR General Index (Total Return) de Global Property Research B.V.). Comprend toutes les sociétés avec une capitalisation boursière > USD 50 millions (2 mois consécutifs), > 15% de free-float et ≥ 75% de revenus immobiliers. |
Une évolution impressionnante du patrimoine jusque fin 2024
Le résultat de l’analyse ont de quoi impressionner: entre début janvier 1985 et le 31 décembre 2024, le patrimoine investi aurait, selon les pays, au moins doublé (comme au Canada) et aurait même été multiplié par près de 66 à Hong Kong. En tenant compte de l’inflation, cela va d’une perte en termes réels au Canada à une multiplication par près de 19 de la fortune en Norvège.
Pour obtenir de tels rendements, il fallait toutefois accepter des fluctuations de cours parfois massives. De plus, les résultats varient considérablement d’un pays à l’autre. Derrière chaque chiffre se cache un chapitre particulier de l’histoire de l’immobilier, du marché des capitaux et de la monnaie de chaque pays – voici un aperçu des principaux développements et tournants dans 7 des 14 marchés analysés par Wüest Partner Research.
Pays | Valeur finale nominale | Ø Rendement annuel (nominal) | Valeur finale réelle | Ø Rendement annuel (réel) | Ratio de Sharpe* |
Hong Kong | HKD 6,63 millions | 11.1% | HKD 1,75 million | 7.4% | 0.22 |
Australie | AUD 5,96 millions | 10.8% | AUD 1,57 million | 7.1% | 0.36 |
Norvège | NOK 5,87 millions | 10.7% | NOK 1,83 million | 7.5% | 0.20 |
Suède | SEK 4,99 millions | 10.3% | SEK 1,65 million | 7.3% | 0.27 |
États-Unis | USD 4,17 millions | 9.8% | USD 1,38 million | 6.8% | 0.31 |
Singapour | SGD 3,59 millions | 9.4% | SGD 1,81 million | 7.5% | 0.19 |
France | EUR 2,52 millions | 8.4% | EUR 1,08 million | 6.1% | 0.26 |
Suisse | CHF 2,17 millions | 8.0% | CHF 1,33 million | 6.7% | 0.46 |
Royaume-Uni | GBP 1,11 million | 6.2% | GBP 0,35 million | 3.2% | 0.12 |
Italie | EUR 1,05 million | 6.0% | EUR 0,31 million | 2.9% | 0.08 |
Japon | JPY 0,81 million | 5.4% | JPY 0,62 million | 4.7% | 0.15 |
Allemagne | EUR 0,61 million | 4.6% | EUR 0,27 million | 2.6% | 0.07 |
Pays-Bas | EUR 0,28 million | 2.6% | EUR 0,12 million | 0.5% | 0.00 |
Canada | CAD 0,19 million | 1.7% | CAD 0,07 million | -0.8% | -0.05 |
* Ratio de Sharpe = rapport entre le rendement annuel excédentaire (par rapport au taux sans risque) et la volatilité. Une valeur plus élevée indique un profil rendement/risque plus attrayant.
Source: Global Property Research; calculs: Wüest Partner
Hong Kong : de l’envol à l’atterrissage en catastrophe et vice-versa
Rares sont les marchés immobiliers qui tirent autant de valeur d’une surface au sol aussi réduite. Entre 1985 et 1997, les prix des logements et des bureaux ainsi que les cours boursiers se sont envolés. Puis la crise asiatique de 1997/98 s’est propagée: entre fin 1996 et août 1998, les sociétés immobilières cotées en bourse ont perdu environ 75% de leur valeur, et les prix des logements ont chuté jusqu’en 2003 à un niveau inférieur d’environ 70% au pic antérieur.
Mais l’économie portuaire et exportatrice ouverte de Hong Kong a entamé une remontée spectaculaire de près de dix ans. Entre 1999 et 2007, le PIB réel a augmenté en moyenne de 6% par an et les actions immobilières ont enregistré un rendement annuel moyen de plus de 18%. La crise financière mondiale de 2008/2009 n’a interrompu que brièvement cette tendance à la hausse – les pertes ont été rapidement compensées.
Cependant, depuis 2019, les manifestations de masse, les nouvelles lois sur la sécurité et les fermetures de frontières liées à la pandémie ont augmenté la nervosité: des études montrent un élargissement des écarts entre prix acheteur et vendeur (bid-ask spreads) ainsi qu’une volatilité intrajournalière accrue sur la Bourse de Hong Kong. Fin 2024, les actions des sociétés immobilières cotaient 34% en dessous de leur plus haut niveau d’avril 2019.
Australie : portée par le boom des matières premières et la migration
L’Australie dispose de l’un des systèmes de REIT (real estate investment trusts – fonds de placement immobilier) les plus anciens au monde. Ces véhicules immobiliers cotés en bourse séduisent par leurs taux de distribution élevés et bénéficient d’un important soutien structurel grâce à une forte immigration nette, qui alimente une demande constante et soutient le marché immobilier. Cette combinaison de croissance démographique, de culture du dividende forte et d’un contexte économique favorable lié au boom des matières premières a permis aux investisseurs de générer pendant de nombreuses années des rendements totaux à deux chiffres. Ainsi, un investissement de 100 000 AUD en 1985 aurait atteint près de 6 millions AUD en valeur nominale en 2024.
Le côté obscur est apparu pendant la crise financière mondiale (2007–2009) : l’indice immobilier a chuté de près de 70% durant cette période. Mais en dehors de cette chute marquée, les fluctuations de cours sont restées modérées en comparaison internationale – et les pertes ont généralement été rapidement compensées. Ceux qui ont su résister au crash de la crise financière – ainsi qu’à quelques autres baisses nettement moins importantes – ont été récompensés par des reprises rapides, une croissance tirée par les matières premières et des rendements de dividendes élevés et fiables.
Norvège : âmes sensibles s’abstenir
La Norvège offre des rendements royaux – mais elle s’adresse plutôt à des investisseurs patients au cœur bien accroché. Un investissement de 100 000 NOK en 1985 se serait transformé en 5,87 millions NOK à la fin de l’année dernière. Corrigé de l’inflation, cela représente un multiplicateur de 18 (soit 1,83 million NOK réels) – le plus fort accroissement de patrimoine réel parmi tous les pays analysés. Cependant, le chemin a été loin d’être tranquille : entre 1989 et 1992, puis de nouveau entre 2007 et 2009, les actions immobilières norvégiennes ont perdu plus de 70% de leur valeur. Malgré cela, le marché s’est redressé, soutenu par deux facteurs clés :
- Le fonds de pension de l’État (Government Pension Fund Global), aujourd’hui l’un des plus importants au monde avec environ 1800 milliards de dollars US, investit en permanence des fonds propres dans l’économie norvégienne et stabilise ainsi également le secteur financier.
- Les promoteurs immobiliers en Norvège travaillent traditionnellement avec des ratios d’endettement élevés. Cet effet de levier se traduit par des bénéfices supérieurs à la moyenne en période de reprise – mais peut entraîner des pertes tout aussi importantes en période de ralentissement.
Le résultat est un marché immobilier volatil, mais extrêmement rentable à long terme. Pas pour les âmes sensibles, mais un voyage qui en vaut la peine pour ceux qui savent résister aux chutes de cours.
France : une performance relativement stable
Le secteur SIIC (Sociétés d’Investissements Immobiliers Cotées) français affiche une solide performance : il a converti un investissement de 100 000 euros en 1985 en 2,52 millions d’euros – dont il est resté 1,08 million d’euros en termes réels, un résultat solide en comparaison internationale. L’évolution a été moins volatile que sur de nombreux autres marchés – mais pas sans heurts non plus. Les investisseurs ont subi leur plus gros revers pendant la crise financière mondiale, lorsque le marché a chuté de 58%.
Depuis 2020, des transformations structurelles – telles que la généralisation du télétravail et les coûts liés à l’adaptation des bâtiments aux normes ESG – pèsent sur les perspectives des formes d’utilisation traditionnelles. Mais celles et ceux qui misent à long terme sur Paris en tant que centre économique et culturel d’envergure internationale continuent de bénéficier de distributions relativement stables – ainsi que de la possibilité de participer activement à la transition vers des usages immobiliers plus souples et durables.
Royaume-Uni : un rendement réel plutôt inférieur à la moyenne
Les engagements dans des valeurs immobilières cotées au Royaume-Uni génèrent des distributions solides – mais les risques monétaires et politiques pèsent sur le résultat. Un investissement de 100 000 livres sterling en 1985 aurait rapporté 1,11 million de livres sterling en valeur nominale à la fin de 2024. Cependant, après correction de l’inflation, il n’en resterait que 346 000 GBP – un résultat nettement plus faible en comparaison internationale.
Le Royaume-Uni est un exemple classique de marché des capitaux libre, dont le potentiel a toutefois été régulièrement occulté par les risques monétaires et politiques. Des événements marquants comme le boom de la déréglementation en 1986 ou les fortes dévaluations de la livre en 1992 et 2016 ont eu plus d’impact sur les cours boursiers que l’évolution des loyers ou de la valeur des biens immobiliers. Celles et ceux qui ont résisté aux revers à répétition ont pu profiter de distributions correctes, mais dans l’ensemble, le rendement réel et le rapport rendement/risque sont restés plutôt en retrait au niveau international – notamment en raison de la forte volatilité. Le secteur de l’immobilier logistique, qui bénéficie actuellement d’une demande stable, constitue une lueur d’espoir. En revanche, les immeubles de bureaux classiques à Londres font face à des coûts de financement élevés, à des obligations de mise en conformité ESG, et à une demande locative parfois attentiste.
Allemagne : chocs de taux et de confiance
Quand la confiance devient une denrée rare, les marchés d’investissement en paient le prix. Un investissement de 100 000 euros en 1985 aurait rapporté 614 000 euros en valeur nominale à la fin de 2024, mais seulement 274 000 euros en tenant compte de l’inflation. La crise la plus grave a frappé le marché pendant la crise financière mondiale, lorsque les actions immobilières ont chuté de 83%. Le ratio de Sharpe de 0,07 seulement le montre: en Allemagne, le risque pris n’a été que très peu rémunéré.
Le secteur immobilier coté en bourse en Allemagne s’est développé relativement tard. D’abord ébranlé par la crise des fonds immobiliers ouverts, il n’a pris son essor qu’avec la montée en puissance des grands groupes résidentiels cotés en bourse. Mais la récente hausse des taux d’intérêt a effacé une part importante des bénéfices réalisés. Investir en Allemagne requiert avant tout une chose: de la patience. Patience face à la lente modernisation structurelle de l’économie et du marché immobilier, et résilience face aux chocs récurrents sur les taux d’intérêt et la confiance, qui ont secoué le marché allemand à plusieurs reprises au cours des dernières décennies.
Suisse : la stabilité, facteur de succès
Il est bien connu que la Suisse marque des points grâce à sa stabilité politique et économique. Un investissement de 100 000 francs suisses en 1985 s’est transformé en 2,17 millions de francs suisses en valeur nominale à la fin de 2024, et en 1,33 million de francs suisses en valeur corrigée de l’inflation. Cela correspond à une croissance solide, bien que peu spectaculaire, sur quatre décennies. La perte maximale par rapport au dernier sommet est restée modérée, à –32 %. Fait particulièrement remarquable: avec un ratio de Sharpe de 0,45, la Suisse offre le meilleur rapport rendement/risque parmi les 14 pays étudiés.
Ce qui peut sembler à première vue une performance modeste s’avère, à y regarder de plus près, un exemple de stabilité et de robustesse des mécanismes de marché. La combinaison d’un endettement modéré, d’une planification territoriale rigoureuse et d’exigences strictes en matière de fonds propres protège efficacement le marché contre les excès – et donc contre les baisses brutales. Les investisseurs institutionnels apprécient tout particulièrement ce profil: il offre des distributions fiables, une faible volatilité et une diversification réelle – sans les fluctuations extrêmes des marchés alimentés par les matières premières ou les devises. Un marché qui ne brille pas par son côté spectaculaire, mais par sa fiabilité – tout comme une horloge suisse.
Le franc fort : un vent contraire permanent
Nous avons également cherché à savoir quel aurait été le résultat d’un investisseur qui aurait placé 100 000 CHF dans chacun des 14 pays il y a 40 ans. Rétrospectivement, le franc suisse s’est continuellement apprécié par rapport à toutes les monnaies étrangères considérées au cours des 40 dernières années. Ainsi, si le capital de départ n’avait pas été investi en 100 000 unités de chaque monnaie nationale, mais bien en francs suisses convertis ensuite dans les indices immobiliers étrangers, la force du franc aurait agi comme un vent contraire permanent.
Concrètement, cela signifie que les rendements annuels moyens des marchés étrangers baissent d’environ 1,5 à 3,6 points de pourcentage, ce qui correspond à la baisse moyenne de la valeur des monnaies concernées par rapport au franc.
Hong Kong constitue une exception: malgré les pertes de change, le marché réalise un rendement moyen de 8,1% par an calculé en francs – ce qui le place juste au-dessus du marché suisse (8,0% par an). Toutefois, ce petit avantage en termes de rendement a un prix: la volatilité annuelle des actions immobilières de Hong Kong est d’environ 36% – plus du double de celle du marché suisse, relativement stable, qui est d’environ 14%.
Même avec une couverture de change complète, les rendements cumulés de la plupart des pays restent inférieurs au niveau suisse. Cela s’explique par le fait que le coût de la couverture annule largement l’avantage des taux d’intérêt plus élevés à l’étranger. Et sur les marchés plus risqués – comme Hong Kong –, le profil rendement/risque plus volatil persiste malgré la couverture.
Pour en savoir plus sur les perspectives à court et à long terme des marchés immobiliers en Suisse, consultez l’Immo-Monitoring.