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Les prix des logements en propriété sont-ils abordables ?

Dernière mise à jour: 24 avril 2025

L’attrait pour la pierre a toujours été fort pour les Français, avec une attirance parti­cu­lière pour la propriété indivi­duelle, même si cela ne se reflète pas vraiment dans les chiffres. Si la part des ménages proprié­taires de leur résidence principale n’a en effet cessé de croître de 1980 à 2010, elle n’a que faiblement augmenté ces 20 dernières années, pour se stabi­liser autour de 58 % aujourd’hui. Cette stagnation illustre le fait qu’il est devenu de plus en plus difficile de financer l’achat de son logement, avec des prix qui ont augmenté plus vite que les revenus. En effet, les prix des logements anciens ont connu une hausse continue (+24 % entre 2018 et 2022), alors que le revenu dispo­nible brut des ménages a affiché une crois­sance de +14 % sur la même période .


La question se pose alors : le logement en propriété est-il abordable pour un ménage moyen ? Et quelle est la part des ménages qui dispose aujourd’hui des ressources suffi­santes pour acquérir son logement ? Cette question est d’autant plus perti­nente que la brusque remontée des taux d’intérêt en 2022 et 2023 a pris de nombreux acqué­reurs à revers rendant pour beaucoup le rêve de la propriété inacces­sible à cause du fort renché­ris­sement du coût annuel de l’accession à la propriété

Méthodes et données de l’analyse

Afin d’apporter un éclairage nouveau sur la question de l’accessibilité finan­cière du logement en propriété, nous avons analysé les données des revenus et des prix dans les dépar­te­ments ainsi que dans les princi­pales villes de France métro­po­li­taine. Nous avons établi le revenu minimal permettant aux ménages d’accéder à la propriété en 2024. Ce calcul prend en compte le prix moyen d’achat au mètre carré d’une maison « type » de 120 m² et d’un appar­tement « type » de 80 m² dans les dépar­te­ments et les villes concernés (source : FNAIM).
Nous avons fait ensuite l’hypothèse que l’acquisition du logement est financée à 20 % par un apport personnel et à 80 % par un crédit immobilier au taux fixe de 4,1 % sur 25 ans (état : janvier 2024). Les règles usuelles recom­mandées par le HCSF lors de l’octroi d’un crédit ont été appli­quées, c’est-à-dire que les charges annuelles liées au logement (amortis­sement, intérêts et assurance emprunteur de 0,35 %) ne doivent pas dépasser 35 % du revenu annuel du ménage. Pour calculer ce revenu, les données de l’Insee (Filosofi) sur les quantiles du revenu dispo­nible des ménages en 2020 ont été utilisées. Le revenu dispo­nible comprend les revenus d’activités, mais également les pensions, trans­ferts et autres presta­tions sociales. Après ajustement pour la taille du ménage et l’évolution des salaires entre 2020 et 2023, il a été possible de construire un revenu dispo­nible médian des ménages par dépar­tement et par ville et de déter­miner la part des ménages dont les revenus sont suffi­sants pour pouvoir envisager un achat immobilier.

Logement en propriété inacces­sible pour 70 % des ménages

Ainsi, à l’échelle nationale, le revenu dispo­nible annuel médian des ménages s’élève à 38 000 euros. En appli­quant le taux d’effort de 35 %, un ménage moyen peut se permettre d’acheter un logement pour 244 000 euros. Il s’agirait du prix « suppor­table » qu’on peut comparer ensuite au prix du marché pour la maison et l’appartement « type » de notre analyse (respec­ti­vement 120 m² et 80 m²). Selon la FNAIM, le prix moyen de vente de la maison et de l’appartement « type » s’élève à 291 500 euros pour la maison et à 307 000 euros pour l’appartement. Que l’appartement soit plus cher que la maison au niveau national s’explique d’une part par le fait que la plupart des appar­te­ments se situent dans des zones urbaines, et donc plus onéreuses, tandis que de nombreuses maisons se trouvent dans des zones périphé­riques ou à la campagne. D’autre part, le standard en termes d’aménagement et de construction est en général plus élevé pour les appar­te­ments.
Les prix du marché présentent ainsi un écart de 19 % pour la maison et de 26 % pour l’appartement par rapport au prix abordable. En d’autres termes, il faudrait un revenu annuel de 48 000 euros environ (respec­ti­vement 45 000 euros) pour pouvoir se permettre un appar­tement (respec­ti­vement une maison) aux condi­tions actuelles du marché. Or, seuls près de 30 % des ménages français tombent dans cette catégorie.

Appar­te­ments : des inéga­lités régio­nales dans l’acces­si­bilité finan­cière

L’accessibilité finan­cière de la propriété diffère consi­dé­ra­blement entre les dépar­te­ments. Si l’on considère les appar­te­ments, dans 23 des 96 dépar­te­ments de France métro­po­li­taine, les prix du marché surpassent actuel­lement le niveau qui serait suppor­table pour un ménage médian. Il s’agit princi­pa­lement des dépar­te­ments de l’Île-de-France (Paris : +177 %, Hauts-de-Seine : +67 %), de la Savoie (+28 %) et de la Haute-Savoie (+24 %) ainsi que des dépar­te­ments le long des côtes méditer­ra­néenne et atlan­tique comme les Alpes-­Maritimes (+68 %) ou la Corse-du-Sud (+36 %), bien que les revenus annuels y soient supérieurs à la moyenne nationale. Dans ces dépar­te­ments, seuls 20 % environ des ménages disposent du revenu néces­saire pour pouvoir acquérir l’appartement « type » de 80 m² de cette analyse. En revanche, dans 70 % du terri­toire, les prix des appar­te­ments restent abordables pour un ménage disposant du revenu médian. Dans certains dépar­te­ments périphé­riques ou plus ruraux comme la Creuse en Nouvelle-Aquitaine, les Ardennes, les Vosges ou la Haute-Saône à l’est de l’hexagone, les prix de vente sont actuel­lement inférieurs au niveau abordable de plus de 50 %, si bien que 90 % des ménages de ces dépar­te­ments pourraient théori­quement accéder à la propriété. Par exemple, les ménages résidant dans les Vosges disposent d’un revenu médian s’élevant à 34 000 euros à l’année, soit 10 % de moins que le revenu médian des ménages français. Cependant, ce revenu est suffisant pour financer l’acquisition de l’appartement « type » qui coûte près de 100 000 euros, soit trois fois moins cher que le prix moyen pour la France.
À première vue, il peut apparaître paradoxal que seulement 30 % des ménages français aient la capacité d’accéder à la propriété au niveau national, alors que 70 % du terri­toire affiche encore des prix consi­dérés comme abordables. Cependant, cette apparente contra­diction s’explique par le fait que les zones les plus onéreuses corres­pondent également aux régions les plus densément peuplées et disposant du plus grand nombre de logements.

Maisons : prix inabor­dables dans près de la moitié des dépar­te­ments

Pour un ménage aspirant à acquérir une maison standard de 120 m², la situation s’avère être plus complexe. Effec­ti­vement, tandis que l’achat d’un appar­tement demeure à la portée d’un ménage au revenu médian dans 73 des 96 dépar­te­ments de la France métro­po­li­taine, l’accessibilité à une maison indivi­duelle se restreint à seulement 53 dépar­te­ments pour ce même ménage. Il est parti­cu­liè­rement difficile ­d’accéder à la propriété dans 30 dépar­te­ments sur les 96 du terri­toire : l’écart entre les prix du marché et les prix abordables y est en effet supérieur à 25 %. On retrouve les stations balnéaires sur la côte atlan­tique et méditer­ra­néenne, l’Île-de-France ainsi que les grandes métro­poles de France. Là encore, ce sont les dépar­te­ments plus ruraux du centre de la France ainsi que la région du Grand Est où les ménages ont le plus de chances de pouvoir s’offrir une maison, malgré des revenus médians le plus souvent inférieurs à la moyenne nationale. C’est le cas par exemple du dépar­tement des Ardennes où les ménages candidats à l’acquisition doivent disposer d’un revenu annuel brut de 23 000 euros pour acheter la maison « type » de cette analyse, alors que le revenu médian atteint un peu moins que 34 000 euros. Ce qui veut dire que 80 % des ménages des Ardennes peuvent se permettre de financer une maison selon les hypothèses de cette analyse. En revanche, les ménages résidant dans les Landes dont le revenu médian est supérieur de 10 % par rapport à leurs homologues des Ardennes, doivent disposer d’un revenu annuel brut de 50 000 euros pour acquérir la maison « type » de 120 m². Ce qui réduit la part des ménages pouvant s’offrir une maison à 20 %.

Quelles villes disposent encore de prix abordables ?

Nous finissons cette analyse par un aperçu de l’état dans les 70 villes du baromètre de FNAIM-Clameur. On assiste à une forte hétéro­gé­néité comme au niveau dépar­te­mental. Ainsi, pour la ville d’Annecy qui est attractive pour sa qualité de vie, l’appartement « type » de notre analyse coûte 439 700 euros et il faut disposer de 68 000 euros pour l’acheter, alors que le revenu dispo­nible médian des ménages s’élève à 40 600 euros. C’est également le cas des villes de Nice et d’Antibes qui sont très prisées comme lieux de villé­giature. À Boulogne-Billancourt qui se distingue par son revenu médian le plus élevé du classement (soit plus du double de la moyenne nationale), seuls 13 % des ménages disposent des ressources néces­saires pour acquérir l’appartement « type » dont le prix s’élève à 705 800 euros. Ces revenus plus élevés ne suffisent donc pas à contre­ba­lancer le niveau élevé des prix. À l’inverse, en bas du classement, on retrouve des villes où les prix des appar­te­ments sont beaucoup plus abordables. C’est le cas par exemple de Mulhouse avec 85 % des ménages qui peuvent accéder à la propriété, et ce malgré un revenu médian nettement inférieur à la moyenne nationale. Avec un prix moyen de 108 300 euros, l’appartement « type » à Mulhouse est en effet 2,8 fois moins cher qu’au niveau national (307 300 euros).

Article issu de l’édition 2024 de l’Immo-Monitoring

Cet article est extrait de notre dernière édition de l’Immo-Monitoring. Si vous souhaitez plus d’infor­ma­tions, vous pouvez télécharger votre exemplaire ici.

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