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Quel est l’impact des classes DPE sur les prix des logements en France ?

Publiée: 22 août 2025Dernière mise à jour : 10 septembre 2025

La rénovation énergé­tique du parc résidentiel est un levier incon­tour­nable pour atteindre la neutralité carbone en France. Mais ces travaux, souvent coûteux, sont-ils réellement valorisés sur le marché immobilier ? Pour répondre à cette question, nous avons étudié quelque 40 000 transac­tions à l’aide d’un modèle statis­tique permettant d’isoler l’impact du DPE sur les prix de vente en contrôlant les autres carac­té­ris­tiques des biens.

Les rénova­tions énergé­tiques sont essen­tielles pour préparer le parc immobilier français à l’avenir. Mais elles consti­tuent un inves­tis­sement important pour les proprié­taires, incluant généra­lement des travaux consé­quents d’iso­lation et le rempla­cement du système de chauffage, entre autres. Leurs coûts peuvent repré­senter plusieurs dizaines de milliers d’euros, même après déduction des aides publiques. Dès lors, la question de leur renta­bilité écono­mique devient centrale pour les proprié­taires. Afin de mieux appré­hender les enjeux écono­miques liés à la rénovation énergé­tique, nous avons cherché à quantifier la valeur verte – c’est-à-dire la plus-value espérée après travaux – et à comprendre comment elle varie selon la pression du marché local, mesurée par les zones Pinel.

Données et méthode

Pour évaluer l’impact du DPE sur les prix, nous avons exploité une base de près de 40 000 transac­tions (20 371 appar­te­ments et 20 194 maisons) réalisées en France entre 2023 et 2024. Il s’agit d’échantillons repré­sen­tatifs provenant de la base notariale officielle (BIEN pour l’Île-de-France et ADNOV pour les régions). Pour chaque bien, nous disposons de nombreuses infor­ma­tions telles que la surface, la locali­sation, le nombre de pièces, l’état général, ainsi que sa classe DPE. Un modèle de régression linéaire multiple nous a ensuite permis d’estimer l’impact des diffé­rentes carac­té­ris­tiques du bien, dont la classe DPE, sur le prix de transaction par m2 des maisons et appar­te­ments (pour plus de détails sur la métho­do­logie : lire l’étude complète).

Résultats : les décotes des « passoires thermiques » peuvent atteindre 30 % en moyenne

La première colonne des tableaux suivants présente la décote moyenne, en pourcentage, du prix des logements selon leur classe DPE, par rapport à la classe A, toutes choses égales par ailleurs. Sans surprise, plus la classe énergé­tique est basse, plus la décote observée est impor­tante. Pour les appar­te­ments, par exemple, un logement classé D affiche un prix d’achat environ 15 % inférieur à celui d’un appar­tement équivalent classé A. Cette décote atteint 30 % pour un bien classé G, à carac­té­ris­tiques compa­rables. Les maisons suivent une tendance similaire, bien que plus modérée dans les classes inter­mé­diaires. Une maison classée D se vend en moyenne 5 % moins cher qu’une maison équiva­lente en classe A, tandis qu’une maison classée G subit également une décote d’environ 30 %.

Les effets des classes DPE divergent sensi­blement selon les zones de marché

Les colonnes 2 à 5 des tableaux ci-dessus permettent d’analyser l’effet diffé­rencié de la classe énergé­tique selon les zones Pinel. Pour les maisons dans les zones les plus tendues (A bis / A), les décotes liées à une mauvaise perfor­mance énergé­tique restent faibles et statis­ti­quement non signi­fi­ca­tives. À l’inverse, dans les zones moins tendues (B2 et C), la décote devient nettement plus marquée. Par exemple, une maison classée G ne subit qu’une décote de 5,8 % en zone A bis / A, mais celle-ci atteint 10,7 % en zone B1, et jusqu’à environ 40 % en zones B2 et C.
Pour les appar­te­ments, le tableau est un peu différent. Des décotes impor­tantes et signi­fi­ca­tives sont observées même en zone A bis / A, ce qui indique que la perfor­mance énergé­tique joue un rôle non négli­geable, y compris dans les marchés très tendus. Par exemple, un appar­tement noté D se vend 10,6% moins cher qu’un bien équivalent noté A dans ces zones, tandis qu’un appar­tement noté G affiche une décote de 19,6 %. Comme pour les maisons, ces effets deviennent beaucoup plus marqués dans les zones peu tendues. Pour un appar­tement noté G, la décote atteint près de 60 % dans les zones B2 et C.

Pourquoi l’effet du DPE est-il moins fort en zone tendue ?

Plusieurs facteurs permettent d’expliquer les diffé­rences observées entre les régions :

  • Forte concur­rence entre acheteurs : la rareté de l’offre limite le pouvoir de négociation, même pour des logements mal classés.
  • Poids du foncier : dans les zones tendues, le prix du terrain repré­sente une grande part du prix global, ce qui réduit l’impact d’éventuelles rénova­tions énergé­tiques sur la valori­sation, en parti­culier pour les maisons indivi­duelles.
  • Profil des acqué­reurs : en zone tendue, les transac­tions concernent plus souvent des inves­tis­seurs, davantage focalisés sur la renta­bilité locative (niveau des loyers, rendement) que sur les dépenses énergé­tiques. Seules les classes F et G, soumises à l’interdiction de location, entraînent un réel désavantage.

Valori­sation poten­tielle des rénova­tions énergé­tiques : une simulation par dépar­tement

À partir des coeffi­cients estimés précé­demment, nous avons calculé, pour chaque dépar­tement de France métro­po­li­taine, la valeur verte attendue qu’un proprié­taire pourrait obtenir en rénovant une maison de surface moyenne (115 m²) actuel­lement classée F sur l’échelle du DPE. Deux scénarios de rénovation ont été envisagés :

Rénovation partielle – passage de F à D : ce scénario suppose des travaux ciblés visant à améliorer certains postes clés, tels que l’isolation de la toiture, l’amélioration de l’étanchéité (joints, tuyau­terie) et le rempla­cement d’une chaudière au fioul par un système à énergie renou­ve­lable. Le coût estimé de ces travaux s’élève à 30 000 euros.

Rénovation de grande ampleur – passage de F à B : ce second scénario suppose une rénovation complète de l’enveloppe thermique du bâtiment, incluant l’isolation des murs extérieurs, planchers et toiture, l’installation de fenêtres triple vitrage, le rempla­cement du système de chauffage par une PAC perfor­mante et la pose de panneaux photo­vol­taïques. Le coût estimé des travaux s’élèverait alors à 75 000 euros (sources pour l’esti­mation des coûts : effy.fr, engie.fr, hellowatt.fr, prix-pose.com, travaux.com).

Une partie de ces inves­tis­se­ments peut être subven­tionnée via des dispo­sitifs publics comme MaPri­me­Rénov’, le prêt à taux zéro (PTZ) ou d’autres aides locales. Leur montant dépend des revenus du ménage, mais attein­drait au minimum 4 000 euros pour la rénovation partielle et 14 000 pour la rénovation de grande ampleur (source : guide sur les aides finan­cières 2025 de l’Agence nationale de l’habitat). Les coûts d’investissement nets seraient alors abaissés à 26 000 et 61 000 euros, respec­ti­vement.

Résultats dépar­te­mentaux : des écarts marqués

La valeur verte repré­sente la valori­sation supplé­men­taire dont bénéficie une maison après rénovation énergé­tique (partielle ou de grande ampleur, respec­ti­vement). Les valeurs vertes les plus élevées (en euros) se situent en Corse, en Savoie et dans les Pyrénées-Atlantiques. Ces dépar­te­ments combinent une forte propension à payer pour la perfor­mance énergé­tique (notamment parce qu’ils appar­tiennent à des zones Pinel peu tendues, comme B2) avec un niveau de prix élevé qui amplifie mécani­quement la valeur verte. À l’inverse, les valeurs les plus faibles sont observées à Paris et dans les dépar­te­ments d’Île-de-France.

Pour le scénario de rénovation partielle, la valeur verte compense le coût (net) des travaux dans la majorité des dépar­te­ments. Seuls six dépar­te­ments, tous situés en Île-de-France, ne permettent pas de renta­bi­liser ces travaux en cas de revente du bien. En revanche, pour le scénario de rénovation de grande ampleur, la renta­bilité est plus difficile à atteindre. Dans près d’un tiers des dépar­te­ments (29 dépar­te­ments sur 96), la valeur verte générée ne couvre pas le coût net des travaux. Et la renta­bilité de la rénovation complète dépend dans une large mesure des aides étatiques : si l’on ne tient pas compte des 14 000 euros de soutien, la valeur verte serait insuf­fi­sante pour couvrir les coûts (bruts) des travaux dans 57 dépar­te­ments.
Cela ne signifie pas que la rénovation est injus­tifiée, mais qu’elle devra s’inscrire dans un horizon de détention plus long, ou se combiner à d’autres motiva­tions, telles que la réduction des charges, l’amé­lio­ration du confort, ou encore l’anti­ci­pation des obliga­tions régle­men­taires.


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