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Améliorer en même temps la durabilité, la renta­bilité et la valeur des immeubles? C’est possible!

Dernière mise à jour: 22 April 2025

Dans l’immobilier, les inves­tis­se­ments pour améliorer la durabilité deviennent inévi­tables. Les régle­men­ta­tions s’accu­mulent et les échéances se rapprochent. Alors, autant anticiper. D’autant plus que ces inves­tis­se­ments, consi­dérés dans une stratégie globale, permettent d’améliorer à terme la renta­bilité d’un immeuble ou d’un porte­feuille ainsi que sa valeur.

Désormais, tout le monde a pris conscience de l’importance du dévelop­pement durable. Y compris dans l’immobilier. Avec un enjeu moral, certes, mais aussi régle­men­taires, puisque, que ce soit au niveau de la Confé­dé­ration ou des cantons, les lois exigeant plus de durabilité s’accumulent, et que les échéances se rapprochent. Pour les acteurs de l’Immobilier, bon gré mal gré, le sujet est devenu incon­tour­nable.

Ce qui pose un vrai problème : comment améliorer la durabilité des immeubles, tout en maintenant la valori­sation et la renta­bilité? Pour le savoir, nous avons interrogé Hervé Froidevaux et François-Xavier Favre, tous deux spécia­listes de l’immobilier chez Wüest Partner. Le groupe, connu pour son expertise dans le domaine immobilier, est aussi actif depuis de nombreuses années dans la durabilité.

Alors, messieurs, comment faire ? Comment améliorer la durabilité de son parc immobilier ?

Avant de se lancer dans une stratégie de rénovation, il faut d’abord savoir où en est son immeuble ou son porte­feuille immobilier. Pour ce faire, nous avons développé ces dernières années toute une série d’outils. Dont deux principaux. D’abord notre calcu­lateur de CO2. Il permet le calcul de la demande énergé­tique des immeubles et le calcul des émissions de CO2. Ensuite notre rating ESG, qui analyse la qualité d’un immeuble ou d’un porte­feuille par rapport aux questions environ­ne­men­tales, sociales et de gouver­nance. 

Ce genre de rating ESG est devenu très populaire, mais on se concentre en général sur la consom­mation d’énergie, le E, en oubliant souvent l’impact social, le S, et presque toujours la gouver­nance, le G.

En effet, c’est pourquoi notre rating ESG se veut équilibré, en prenant vraiment en compte les trois aspects de la question. Donc aussi le social, avec des points comme l’acces­si­bilité, le confort ou la sécurité. Et la gouver­nance, avec des aspects comme le côté innovant des nouveaux projets, les processus parti­ci­patifs, l’implication de la population, des concours d’architecture, sans oublier tous les aspects tradi­tionnels de la gouver­nance dans la gestion de l’entre­prise. Il est important pour tous les parte­naires de savoir que le proprié­taire est respon­sable et prend en compte la durabilité dans sa gouver­nance.

Durabilité-immoday

Une fois que vous avez établi le constat, que proposez-vous au proprié­taire d’un parc immobilier ?

Cette première analyse va permettre la mise en place d‘une stratégie de rénovation énergé­tique, avec projection de la trajec­toire de réduction de CO2, pour qu’elle corres­ponde aux objectifs clima­tiques de la Confé­dé­ration, visant la neutralité carbone en 2050, et aux objectifs spéci­fiques du proprié­taire à court et moyen terme.

Ce qui signifie essen­tiel­lement des coûts pour le proprié­taire et donc une baisse de sa renta­bilité…

Pas seulement, car la stratégie que nous proposons ne se limite pas à la réduction de la consom­mation d’énergie. Elle est vraiment globale, et c’est ce qui fait, je crois, notre force. Nous ne faisons pas de propo­si­tions techniques décon­nectées de la réalité écono­mique. D’une part, notre stratégie va permettre d’améliorer la durabilité d’un porte­feuille immobilier et de minimiser les risques futurs que créeront les nouvelles régle­men­ta­tions.  D’autre part, c’est aussi l’occasion de valoriser au mieux un porte­feuille ou des projets immobi­liers, par exemple en augmentant les surfaces ou en améliorant l’usage tout en intégrant des éléments clés écono­miques tels que la réper­cussion sur les loyer des économies faites sur les frais de chauffage et sur la taxe CO2, la valori­sation de l’augmentation des surfaces et les subven­tions canto­nales.

Vous êtes donc en train d’affirmer que la durabilité pourrait aussi être une oppor­tunité pour les proprié­taires ?

Effec­ti­vement et c’est vraiment dans cette optique que nous faisons nos propo­si­tions. Nous consi­dérons, d’une part, les préoc­cu­pa­tions environ­ne­men­tales, et, d’autre part, l’efficacité écono­mique. Pour nous, l’un ne va pas sans l’autre. Et nous pouvons le faire justement parce que nous avons cette double compé­tence d’expert immobilier et d’expert en durabilité. Il faut vraiment, à chaque fois, trouver la stratégie la plus judicieuse d’un point de vue écono­mique et garder sans cesse un œil sur l’évolution de la valeur des biens immobi­liers.

Concrè­tement, que proposez-vous pour renta­bi­liser ces inves­tis­se­ments dans la durabilité ?

Pour faire simple, dans le cadre d’une approche globale des travaux de rénovation, il y a trois grandes oppor­tu­nités de revenus supplé­men­taires. Premiè­rement, est-ce que l’on arrive à augmenter les surfaces, par exemple en construisant un étage supplé­men­taire ? Deuxiè­mement, est-ce qu’on peut améliorer la typologie, en restruc­turant les espaces déjà existants – on sait par exemple que les très grands appar­te­ments sont devenus diffi­ciles à louer avec des loyers par mètre carré intéres­sants – pour optimiser ses loyers et diminuer les vacances? Et troisième oppor­tunité de revenus supplé­men­taires, l’écart entre les loyers actuels et les loyers poten­tiels après rénovation et baisse des charges. Trois pistes qui permettent d’augmenter la valeur et la renta­bilité de son porte­feuille.

À moyen terme, oui, mais à court terme ce sont quand même des inves­tis­se­ments qui peuvent être extrê­mement impor­tants.

Effec­ti­vement, mais c’est aussi une oppor­tunité à saisir. D’autant plus aujourd’hui où, dans un contexte général de prix immobi­liers élevés, ce qui limite les oppor­tu­nités d’achat intéres­santes, la stratégie d’investissement la plus rentable est sans doute de travailler sur son propre parc pour en augmenter la valeur et la renta­bilité.

D’accord pour le principe, mais en pratique, un peu cyniquement, quand on possède des immeubles rentables, la meilleure stratégie ne serait-elle pas de ne rien faire ?

On peut le penser, on peut penser que tout ce qui améliore la durabilité n’est qu’une charge finan­cière qui va impacter négati­vement la renta­bilité de son porte­feuille. Mais c’est ignorer deux réalités. La première ce sont les régle­men­ta­tions qui se multi­plient, surtout au niveau cantonal, concernant aussi bien les méthodes de chauffage, que l’isolation ou l’empreinte carbone. Il sera donc bientôt impos­sible aux proprié­taires d’échapper aux inves­tis­se­ments de rénovation énergé­tique. Il vaut donc mieux ne pas attendre le dernier moment. Anticiper permet de mettre en place une stratégie plus efficace, et au final moins coûteuse. D’autre part, surtout pour les acteurs de l’investissement indirect, que ce soient des fonds, des sociétés cotées ou des fonda­tions, il est de plus en plus difficile de convaincre des inves­tis­seurs, et en parti­culier des inves­tis­seurs insti­tu­tionnels ou inter­na­tionaux, si son porte­feuille ne respecte pas certains critères de durabilité.

À ce sujet, est-ce que votre rating ESG est suffisant pour convaincre ces inves­tis­seurs insti­tu­tionnels et inter­na­tionaux ?

Il est conforme aux labels suisses et européens, tels que DGNB, BREEAM, SNBS, GRESB. Ce dernier étant d’ailleurs parti­cu­liè­rement important, parce que souvent exigé par les inves­tis­seurs inter­na­tionaux. De ce point de vue, nos critères sont donc largement compa­tibles, bien que simplifiés par rapport au GRESB, qui est très complet, mais aussi plus complexe à analyser.

Pour conclure, quelle stratégie de rénovation doit adopter un proprié­taire pour atteindre ses objectifs de durabilité, tout en améliorant sa valori­sation et sa renta­bilité ?

Il n’y a pas de formule miracle. Tout dépend du type d’immeuble, de son empla­cement, du montant des loyers. Il faut donc tout analyser en profondeur, avant de mettre en place une stratégie qui permettra, au final, une augmen­tation de la renta­bilité et de la durabilité. Donc analyser ce que ça coûte mais aussi anticiper ce que ça rapportera. Sans oublier, dans cette analyse, que les régle­men­ta­tions sont de plus en plus contrai­gnantes. Il faut donc bien faire attention à éviter les change­ments uniquement cosmé­tiques, qui risque­raient assez rapidement de ne pas suffire.

Et si on ne fait rien, quels sont les risques ?

Les questions ESG sont en train de devenir centrales, pour le régulateur, pour la population et pour les inves­tis­seurs. Les belles décla­ra­tions des acteurs de l’immobilier, quand elles ne sont qu’un outil marketing, ne suffisent plus. Il faut maintenant des gestes concrets, des inves­tis­se­ments. Au-delà des contraintes régle­men­taires, n’oublions pas non plus que le marché immobilier, après plusieurs années relati­vement faciles, est en train de changer. En Suisse, les nouveaux projets se sont multi­pliés ces dernières années et la crois­sance de la population est plus faible que prévue. Bref, alors que pendant longtemps la demande a été supérieure à l’offre, la tendance s’inverse. Autrement dit, si l’on ne propose pas des objets de qualité, ça va devenir de plus en plus difficile de les louer et peut-être même impos­sible de les vendre. Donc, répétons-le, autant anticiper, investir dans la durabilité et intégrer ces inves­tis­se­ments dans une réflexion plus large sur la renta­bilité de son porte­feuille, en utilisant des outils pragma­tiques. Un proprié­taire n’a aujourd’hui plus aucun intérêt à attendre avant de faire ces inves­tis­se­ments pour la durabilité de ses immeubles, inves­tis­se­ments qui sont de toute manière désormais inévi­tables.

Lire l’article original de immoday.